TICKET CLIVANT À CONVERSER

Numéro 10. Octobre 2025


Éditions du respirateur
https://respirateur.com/bisphenola/10
 
 


Ce texte a été écrit durant une journée/nuit de canicule lors d'une longue marche, puis dans un état de demi-sommeil. Il va être brodé sur l'entièreté d'une combinaison, avec comme perspective de le lire lors d'une performance.

 
Mélodie Bajo
 
 
Charlène Guyon-Mathé
 
Sur des songes déhanchés ou Les furieux tranquilles
 
 
Marion Bouvarel
 
Balais Limites
 

La fille aînée perd ses cheveux quand elle les touche,
donc elle blesse à sang le crâne de sa chienne favorite.
À la banque où elle travaillait son comportement était si inadapté que c’en était ridicule.
Mais à la boulangerie, elle fait le ménage avec une collègue à fort caractère.
Sur son balai, il y a un oiseau. Il reste là, l’oiseau. Il faut le faire entrer par la porte.
Son professeur de philosophie la regarde.
D’ailleurs, beaucoup d’hommes entrent, depuis longtemps, et la boulangère à fort caractère les chasse.
La fille aînée aimerait partir à leur suite. Donc elle reste avec l’oiseau.
Pendant ce temps, le père, lui, est dans le grenier avec sa cousine Lucienne. Il commence à être envahi par une impression de foutoir.
Le père voit un balai brosse noir, brillant. Il voit aussi une pelle. Il prend les deux mais les échappe et tout chute au rez-de-chaussée.
Alors la cousine Lucienne se met à crier : « Mais qu’est ce que tu fous ?!!! »
Elle scande « J’en ai d’autres que celui-ci ! Il. est. spécial. poil ! »
Elle égraine tout un tas de particularités qui rappellent au père une vision d’Afrique.
Quand il est chez la mère, il est différent, le père. Chez la mère, Il est tout jeune.
Il traverse la maison.
Il a une serviette éponge sur les épaules.
Des cheveux qu’il vient de couper y sont accrochés.
Le père sourit.
La mère y voit de la désinvolture.
Les cheveux du père tombent partout sur le sol.
La mère lui demande d’aller se secouer au jardin.
Le père rit.
Instantanément la mère lui demande de balayer.
La mère lui demande de respecter les autres.
La mère dit que les autres en l'occurrence c’est elle !
Le père part dans une petite partie de la maison qu’il loue à la mère.
La mère pense que le père est désinvolte.
La mère pense que le père est immature.
La mère est énervée par le père.


Ce texte est extrait de Famille Endormie, un projet d’écriture expérimentale et collective. À sa demande, les membres de la famille de l’autrice ont consigné leurs rêves dans des carnets pendant sept années. Ces fragments ont ensuite été réunis et réorganisés en un récit non linéaire, construit selon une logique de glissement entre motifs analogues. Les rêves s’y répondent par échos, résonances ou transformations progressives, dessinant ainsi, à travers leurs récits et leurs images, le portrait en creux de cette famille, et au sens plus général, celui d’une famille possible, institution à la mémoire partagée, à l’imaginaire commun façonné par l’histoire, la culture, les formes de pouvoir et de filiation. Cette écriture expérimentale est mouvante et aime à se transformer lorsqu’on l’invite à se montrer.

 
Eva Niollet
 
 
Alexandre Finkelsztajn
 
je ne rêve pas.
 

je ne rêve pas.
en fait, déjà je ne dors pas - peu / pas assez?

je crois que je ne dors pas car je voudrais que la nuit soit destinée à éveiller mes rêves.

je voudrais qu’iels prennent vie sous la lune.
je voudrais que la lune soit la nourrice de mes rêves,
qu'elle soit spectatrice de leurs danses.
_
j’avais lu qu’une idée vient à nous car elle nous choisissait ; qu’il fallait alors en prendre soin, la considérer. autrement elle irait voir une autre conscience et ce, jusqu’à être matérialisée.
c’est beau, je trouve.

j’aime l’idée que nos rêves, elleux aussi, nous choisissent.
que notre subconscient les accueille et que nous devons faire le choix de découvrir leur raison de leur visite, ou non.

notre manière de les accueillir détermine une grande partie de leur voyage, et in fine, de notre voyage également.

« bonjour, bon matin »
comment accueillez-vous vos rêves?
est-ce que vous leur servez du thé chaud? du lait froid? du jus de banane? des vitamines en ce retour des jours moroses?

est-ce que l’on demande aux rêves s’iels ont bien dormi?
est-ce que les rêves font des cauchemars?

je me suis souvent demandé de quelle vie aurait rêvé le moi dont je rêve d’être.
j’avoue que maintenant je ne me pose plus la question, je ne rêve plus.
je ne sais pas si je ne m’autorise plus à rêver ou si je me dis que je vis la vie que je rêve.
je passe le temps.
le temps me traverse, fugace.
si on lui court après, il s’efface.

les algorithmes sont absorbeurs de rêves.
_
« bonne nuit, dormez bien »
on reçoit, on réceptionne, on télécharge nos rêves et on se démerde avec à notre manière. comme on peut.

marrant que l’on ait une création interne qui nous offre un projection personnelle nocturne.

peut-être faut que je me vende mon sommeil comme ça?
il me faut un marketing du sommeil, un marketing du rêve.
_
je crois que je n’aime pas dormir.

c’est con hein, ça finit toujours par arriver à chaque fin de journée.

 
Marion Nemoz
 
BLM BOUFFE BLF 40
 

40.

Dans mon rêve il faisait nuit mais c’était le jour.
Il y avait une femme d’Instagram, celle aux très longs cheveux gris, une autre me demandait si je me sentais heureuse,
Si le moment présent était là,
Je répondais oui.
Dans mon rêve, il y avait une piscine et la mer tout autour. Une mer noire bleu profond, j’y plongeais, c’était glacé le matin.
J’ai adoré, des anglais me conseillaient de boire un thé.
Alors pendant que la machine tournait pour le linge sale, je retrouvais mon amour qui sortait de la douche,
Il me souriait, je me suis réveillée.

 
Claire Von Corda
 
Bisphenol-a est une revue mensuelle qui s’attache à décrire les zones troubles entre mots et mondes. C’est une polyphonie.
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Le prochain numéro aura pour thème "Les jeux".






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